Tizozios

Voilà un disque à écouter les yeux fermés, au moins pour commencer. Le pépiement des oiseaux, ce son si familier de nos étés, vient cueillir les tous-petits comme les plus grands. Toujours soucieuse de stimuler l’écoute des bambins par des musiques et des arrangements de qualité, Isabelle Caillard a sélectionné une pléiade de chansons françaises et de comptines : des incontournables, La p’tite hirondelle, Mon petit lapin a bien du chagrin, et de moins connues, Pingo les noix, L’oiseleur, Bergeronette et folle cigalette, tout aussi enrichissantes. Oisons, canards, lapins, escargots peuplent cet univers bucolique et enjoué. Les chants des crapauds deviennent des percussions inattendues, qui donnent le ton à quatre voix a capella : « Crapiaud saute saute saute saute, Crapiaud saute tout autour de moi ». Les chuchotements hésitants, rires, voix chantées et parlées des enfants leurs répondent… Et l’ensemble donne irrésistiblement envie de se retrouver pour construire une cabane au fond du bois et chanter ensemble.

Isabelle Caillard s’est associée avec Harold Abraham, musicien antillais, pour donner du peps aux arrangements, convaincue que les rythmes syncopés et les ballades chaloupées contribuent à éveiller l’oreille de nos enfants. Ceux-ci ont grand plaisir à s’approprier les textes courts, répétés sur des airs enlevés : « Pour passer le Rhône, il faut savoir danser, allons passe passe passe, Allons passe donc ! » Guitare, contrebasse, accordéon et flûte acoustiques s’harmonisent en laissant de la place pour des solos de violon jazz et quelques cœurs qui frisent le gospel et la soul. On a du mal à croire, alors, que ces 21 chansons et comptines ont été composées il y a des décennies, voire des siècles ! La tradition se transmet à la nouvelle génération avec légèreté et allégresse. L'interprétation inventive des jeunes jazzmen Zacharie Abraham à la contrebasse et Pierre Perchaud à la guitare y apportent leur swing et leur virtuosité.

Le disque, enchanteur, nous fait passer en douceur de chansons rigolotes à des mélodies plus suaves. Et le livret, délicieusement illustré par les aquarelles de Christine Thouzeau, concourt à nous faire entrer dans ce monde onirique, jamais mièvre. Les couleurs chaudes, fondues, mettent en valeur des animaux cocasses, grenouille amoureuse, poissons danseurs, chaton en pelote de laine… A la dernière page, « Dors mon bel enfant », à deux voix, berce les petits rêveurs et les pousse à refermer leurs yeux, au son des grillons de la nuit.